01 février 2013

La myopathie atypique des équidés

    • Les chevaux n'aiment pas les hélicoptères. Mortalités fulgurantes chez les chevaux au pré en automne, le coupable serait un érable (source Equiliberté72)


    Par Catherine Delguste, doctorante en faculté de médecine vétérinaire.
    Une chercheuse vétérinaire liégeoise et son équipe ont mis en évidence la toxine responsable de la myopathie atypique, syndrome équin hautement mortel qui sévissait de façon récurrente dans notre pays, comme dans d’autres pays d’Europe, depuis le début des années 2000.
    Le mystère est enfin élucidé : la cause de la myopathieatypique a été trouvée. Il s’agit de l’hypoglycine A, toxine hautement mortelle pour le cheval qui est présente dans les fruits (« hélicoptères », appelés samares en botanique) de l’érable sycomore (Acer pseudoplatanus). C’est l’ingestion de ces samares qui est responsable de la mort de plus d’un millier de chevaux en Europe depuis une douzaine d’années (Votion, 2012).
    Une histoire douloureuse déjà évoquée sur ce blog

  • Mortalité de chevaux en Sarthe
Des cas de mortalité de groupe de chevaux ont été signalés à Mézeray et à Jupilles, selon les  infos que j'ai prises auprès de Guillaume Fraiman, cela serait dû à une mycotoxine cad, une toxine élaborée par une moisissure qui ne pousse que sur les feuilles et les bois moisis. Le risque est donc important pour tous ceux qui ont des pâtures en lisière de bois. 
Dès que la mycotoxine cad est ingérée la mort de l'animal intervient très rapidement.
Par précaution il vaut mieux retirer les chevaux des terrains très humides proches de ces conditions et leur donner à boire de l'eau du robinet...
Le diagnostique de Guillaume Fraiman Vétérinaire:

MYOPATHIE MYOGLOBINURIE ATYPIQUE du Cheval


-fulgurante (75 %dcd en 72h)
-saisonnier: automne (feuilles mortes bois mort) humidité chaleur
-jeunes cv de moins de 5 ans et plus de 20 ans
-état d'entretien non factuel
-idem pour les conditions de Travail
-prés en pente
-attention au récidives printemps
-difficultés respiratoires
-bon appétit
-coliquettes vésicales
-Fréquence cardiaque augmentée
-faiblesse et raideur arrière main
-cause: clostridies, mycotoxines?
-traiter les copains , la maladie pouvant intervenir jusqu'à deux jours après rentrée au box

Haras Nationaux


La myopathie atypique est une maladie désormais bien présente en France et en Europe. Il est nécessaire de la connaitre afin d'adopter les bons gestes et attitudes pour prévenir son apparition. Cette page vous y aidera.

LA MALADIE

(©ACG/IFCE)
La myopathie atypique (MA), appelée aussi myoglobinurie atypique des chevaux au pré, est une maladie généralement fatale se caractérisant par une dégénérescence sévère de différents groupes musculaires, dont les muscles intervenant dans la respiration, la posture, ou encore le muscle cardiaque.

La MA frappe les équidés de toutes espèces (chevaux de trait, de selle, poneys, ânes et zèbres) séjournant en pâture la majeure partie de la journée.

La MA ne présente pas les caractéristiques d’une maladie contagieuse.Cependant, son apparition étant liée à des conditions environnementales particulières, plusieurs chevaux pâturant sur une même prairie peuvent être affectés simultanément. Les séries cliniques se déclarent essentiellement au printemps et en automne. 

Récemment (2010), il a été montré que la MA était associée à la présence de la toxine létale de la bactérieClostridium sordellii dans les fibres musculaires des chevaux atteints. Cette observation suggère que cette bactérie joue un rôle dans la pathogénie en tant que facteur létal et/ou initiateur. 

SITUATION EUROPÉENNE

Figure 1 (a) : Cas de myopathie atypique recensés (cas confirmés, hautement probables ou rapportés sans diagnostic définitif) en Europe de 2006 à 2009. (©F. Patarin)
Figure 1 (b) : Cas de myopathie atypique recensés (cas confirmés, hautement probables ou rapportés sans diagnostic définitif) en France à l’automne 2009. (©F. Patarin)

La myopathie atypique est reconnue depuis 1984 en tant qu’entité affectant spécifiquement les équidés. Jusqu’alors, la maladie n’était apparue que sporadiquement.

A l’automne 1995, plus d’une centaine de chevaux sont morts de MA dans le nord de l’Allemagne où le syndrome n’avait jamais été diagnostiqué auparavant.

En Belgique, les premières épizooties importantes furent enregistrées au cours de l’arrière-saison dans les années 2000 et 2002. 

A l’automne 2002, la MA était signalée pour la première fois dans le nord-est de la France. Depuis, elle est diagnostiquée dans un nombre croissant de pays européens. 

Au cours de l’automne 2009, l’Europe était confrontée à la série clinique la plus importante jamais rencontrée :

371 cas de MA ont été recensés (figure 1b). Parmi ces chevaux, 265 sont décédés (taux de survie : 22%). 

Les pays touchés furent : l’Irlande (2), la Belgique (64), la France (124), l’Allemagne (92), le Danemark (2), les Pays-Bas (19), la Suisse (30), le Royaume-Uni (35), le Luxembourg (2) et une origine non communiquée (1). 

Les autres pays précédemment touchés sont l’Autriche, l’Espagne, l’Italie, la Lituanie et la Norvège.

Outre-Atlantique, la MA a été signalée aux Etats-Unis d’Amérique ainsi qu’au Canada.

DIAGNOSTIC


Un diagnostic de présomption de MA est basé sur l’anamnèse (l’historique du cas), les signes cliniques, les résultats de laboratoire et ceux de l’examen post-mortem.

Le diagnostic définitif est établi à partir des résultats de l’examen histologique des muscles atteints(généralement, les muscles posturaux et respiratoires). 

Les éléments les plus importants de l’anamnèse, des signes cliniques, des résultats de laboratoire et de l’examen post-mortem évoquant un diagnostic de MA sont repris ci-après. Il est à noter que ces éléments peuvent être présents en tout ou en partie.
Figure 2 : Pâtures localisées en Belgique présentant les caractéristiques fréquemment rencontrées dans des parcelles où des cas de myopathie atypique ont été diagnostiqués. (©D. Votion)

Anamnèse

Le diagnostic de myopathie atypique du cheval au pré sera exclu si le cheval est gardé au box.

Les séries cliniques se déclarent essentiellement à l’automne et dans une moindre mesure en hiver et au printemps. Elles sont liées à des conditions environnementales qui constituent des facteurs de risque liés :
  • aux conditions climatiques : les séries cliniques les plus importantes ont été rencontrées lors d’automnes doux mais pluvieux ; les conditions tempétueuses semblent constituer un facteur déclenchant ;

  • aux prairies : les pâtures à risque sont celles où des chevaux sont morts précédemment, contenant de l’herbe rase, fortementpentues, contenant des feuilles mortes amassées, humides, bordées ou contenant un cours d’eau ainsi que les prairies dans le fond d’une vallée et/ ou d’une dépression ;

  • aux chevaux : les chevaux à risque sont essentiellement ceux demoins de 3 ans (surtout les poulains de 18 mois), les chevaux âgés, maigres ou d’embonpoint normal (les chevaux obèses sont moins à risque), non vaccinés et non vermifugés ;

  • aux techniques de gestion des chevaux et des pâtures :l’absence de complémentation avec des aliments pour chevaux,le foin déposé à même le sol dans un environnement humide (surtout en automne), l’épandage des fèces et le pâturage permanent sont des pratiques qui favorisent le risque de MA.

Les mesures de prévention visent à limiter ces facteurs. 

La collecte constante des informations épidémiologiques via le réseau AMAG (réseau d’alerte de la MA: voir paragraphe « recensement des cas ») permettra de redéfinir ces facteurs de risque ainsi que d’identifier des facteurs de prévention.

Signes cliniques

La MA sera présumée lorsque, chez un cheval séjournant la majeure partie du temps en prairie et n’ayant pas fourni d’exercice physique préalable, les signes cliniques suivants sont observés (en tout ou en partie) :
  • faiblesse, raideur, difficulté ou refus de se déplacer ;
  • le cheval est trouvé couché au pré et présente des difficultés ou une incapacité à se lever ;
  • le cheval est trouvé mort au pré sans signe annonciateur ;
  • l’urine apparaît anormalement foncée (les chevaux souffrant de MA ont souvent des difficultés pour uriner et par palpation transrectale, la vessie apparaît souvent distendue) ;
  • muqueuses injectées ou cyanosées ;
  • psychisme déprimé ;
  • tremblements musculaires ;
  • fréquence cardiaque élevée ;
  • difficultés respiratoires ;
  • sudation localisée ou généralisée ;
  • hypothermie (< 37°C) ; parfois, de l’hyperthermie est rapportée ;
  • coliques (résultant parfois de la distension vésicale excessive) ;
  • appétit conservé voire exacerbé.

Examens de laboratoire

L’analyse sanguine révèle une augmentation massive des enzymes musculaires confirmant une rhabdomyolyse(destruction du muscle squelettique) sévère. 

A ce titre, le dosage des enzymes musculaires est essentiel pour considérer l’existence d’une MA. L’activité de la créatine kinase (CK) dans le sang dépasse généralement la dizaine de milliers, peut atteindre les centaines de milliers, voire même dépasser les millions d’unités internationales (UI) par litre (taux normal : 50 – 200 UI/L). 

L’interprétation d’une hausse modérée des CK (moins de 5.000 UI/L) est délicate car tout décubitus (position allongée) prolongé peut engendrer une rhabdomyolyse significative des muscles écrasés par la masse corporelle sans qu’une myopathie soit à l’origine des signes cliniques observés.

Souvent, de l'hypocalcémie, de l'hyperglycémie et de l’hyperlipémie sont présentes et les enzymes hépatiques sont augmentés.  L'urine est colorée en raison de la myoglobinurie, qui devrait être différenciée de l'hématurie ou de l’hémoglobinurie.

Examens post-mortem

Figure 3 
Figure 4
A l’autopsie, des décolorations au niveau de certains groupes musculaires peuvent être observées (figure 3). Néanmoins, il n’est pas rare qu’aucune lésion macroscopique soit observée.


Le diagnostic définitif de MA est posé à partir de prélèvements musculaires effectués sur des muscles posturaux (éventuellement par biopsie, sur des chevaux vivants ; exemples : muscles de l’épaule) et respiratoires (exemples : diaphragme, muscles intercostaux).

Le diagnostic sera posé lorsque l’examen histologique des muscles révèle une dégénérescence musculaire multifocale (figure 4).

Légendes:
Figure 3 : Zone de décoloration observée dans un muscle postural à l’autopsie
Figure 4 : Lésions de dégénérescence musculaire induites par la myopathie atypique au niveau d’un muscle postural (muscle de l’épaule). Coloration à l’hématoxyline et à l’éosine ; Grossissement : x 200

TRAITEMENT

La médication face à un cas de MA visera:

  • à limiter la douleur et les lésions associées à la destruction des muscles,

  • à corriger les désordres acido-basiques et électrolytiques,

  • à lutter contre une infection de type clostridienne

  • à fournir des substrats énergétiques utilisables par le cheval souffrant de MA (essentiellement à base de sucres puisqu’une étude a montré que la MA induisait un dysfonctionnement dans le métabolisme des lipides).

RECENSEMENT DES CAS

En 2005, un réseau d’alerte de la MA a été constitué : il s’agit de l’AMAG (pour Atypical Myopathy Alert Group, en anglais). 

Ce groupe d’alerte initié par l’Université de Liège et géré par le Centre européen du Cheval (Belgique) rassemble les chercheurs et cliniciens européens confrontés à la problématique de la MA.

Depuis l’apparition des premiers cas français en 2002, le Réseau d’EpidémioSurveillance en Pathologie Equine (RESPE ; www.respe.net), participe au réseau européen.


Le groupe AMAG collecte les informations épidémiologiques et cliniques auprès des propriétaires de chevaux et des vétérinaires (de terrain, de cliniques privées et universitaires)  et informe les professionnels de la filièreéquine lors de l’émergence de séries cliniques. 
Ce travail est essentiellement géré via un site Internet (www.myopathieatypique.be) qui n'est malheureusement plus fonctionnel à ce jour. L'association "Vaincre la Myopathie Atypique Equine" (www.vmae.net) s'est constituée et soutien la lutte contre cette maladie.

PRÉVENTION

Actuellement, il n’existe aucun traitement spécifique de la myopathie
Si les recherches futures confirment le lien causal entre la MA et le Clostridium sordellii, une sérothérapie et/ ou une vaccination (prévention) pourront être envisagées. Néanmoins, le développement d’un vaccin spécifique nécessitera de longues années et d’ici là, la prévention est le meilleur outil de lutte contre la MA.

Les principales mesures de prévention (sur la base des facteurs de risque et de protection identifiés) concernent :
  • les chevaux : rentrer en priorité les jeunes et les vieux chevaux à l’écurie lorsque des séries cliniques de MA se déclarent, les vacciner et les vermifuger régulièrement ;

  • les pâtures : offrir aux chevaux des prairies suffisamment fournies en herbe en automne, retirer les amas de feuilles en automne, empêcher l’accès aux zones humides lors des périodes à risque, supprimer toute plante potentiellement toxique ainsi que toute moisissure ;

  • les techniques de gestion : rentrer les chevaux à l’écurie lorsque des séries cliniques de MA se déclarent, rentrer les chevaux à l’écurie lorsque les conditions climatiques sont défavorables (pluie, vents violents, premiers jours de gel …) à l’automne et au printemps, nourrir les chevaux avec des concentrés à l’automne et au printemps, abreuver les chevaux avec de l’eau de distribution, mettre une pierre à lécher à disposition des chevaux, préférer le retrait manuel des fèces à l’épandage mécanique.

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